Détail du compte rendu
Date : |
4/16/2015 |
Lieu : |
Escouloubre. Aude |
Activité : |
Aguzou - Le classique |
Description :
Participants : Didier, Thierry, Morgane F, Gisèle
Guide : Philippe.
Ce jeudi, après une bonne heure de virages acrobatiques et de prières à tous les dieux de notre connaissance sur les sinueuses routes de l’Aude, nous (Didier, Thierry, Morgane F, Gisèle) nous extrayons de la BMW de Didier sur un petit parking où nous retrouvons notre guide, Philippe.
Une passerelle branlante au-dessus de la rivière, une grimpette de 80 m de dénivelée dans le bois et nous voici à pied d’œuvre, ou plutôt au pied d’une falaise où s’ouvre notre but du jour : l’Aguzou, une cavité soumise à autorisation comme le TM 71 qui lui fait face.
Philippe nous explique l'historique des découvertes, une première porte blindée nous donne accès à une salle assez imposante où volètent quelques chauves-souris, puis nous cheminons jusqu’à une deuxième porte.
Le balisage commence, le concrétionnement se fait de plus en plus présent. La calcite se déploie en stalagmites, stalagtites et draperies, d’un blanc translucide ou teinté d’ocre plus ou moins rouge selon les minéraux présents dans la roche.
La calcite est tellement pure qu'elle se cristallise parfaitement et forme des stalagmites de section triangulaire, tout à fait bizarre ! L’aragonite ponctue les parois de mouchetures blanches, se tortille en feux d'artifice d’excentriques fines comme des cheveux ou de l’épaisseur d’un crayon.
Philippe nous détaille les dernières hypothèses concernant ces improbables structures minérales : elles se forment grâce à la tension superficielle, non grâce au vent ou aux bactéries comme supposé précédemment.
À Petits Pas Tranquilles et Légers, muets devant tant de merveilles, nous Restons Concentrés et progressons délicatement entre les ficelles délimitant notre parcours, en veillant bien à Ne Pas Glisser (c’est vrai que cette s***rie de calcite humide est assez traîtreuse !), à Ne Pas Marcher Dans Les Flaques (pour ne pas projeter d'éclaboussures), à Ne Pas Toucher La Paroi et à Baisser Notre Tête.
Nous sommes moins que prévu : quatre au lieu de huit. Du coup, nous avons droit à un traitement de faveur et pouvons aller contempler la Salle des Mille et Une Nuits ; un à un, nous nous coulons à plat ventre et passons notre tête dans une lucarne pour admirer un paysage féerique de concrétions étincelantes qui tapissent toute la salle du sol au plafond.
Les yeux pleins de paillettes et quelques échelles fixes plus loin, nous descendons jusqu’à la salle à manger où nous attend un décor très seventies : sous une grande bâche en plastique, des tabourets d’un orange pétant en forme de diabolos, autour de petites tables rondes que Philippe habille de nappes blanches et décore de bougies, tandis que nous attendons sur des tapis rouges afin de ne pas trop imbiber nos semelles d’argile.
Nous nous asseyons pour déguster nos collations (au-dessus de la nappe, pour les miettes) accompagnées d’un petit café ou thé préparé par notre guide. Thierry en profite pour aller évacuer les cafés précédents, sous l'œil vigilant de Philippe (dans le bidon ! pas à côté !).
Nous nous remettons en route et, de nouveau, bénéficions de privilèges : nous irons plus loin que la visite traditionnelle - merci aux absents ! -. Médusés, nous admirons : des trottoirs et planchers de calcite ; un énorme disque tellement alourdi par le concrétionnement que sa partie inférieure s'est crashée au sol ; les plus grosses « dents de cochon » que nous ayons jamais vues, solitaires, en gerbes ou en nénuphars ; des triangles de calcite de dix cm de côté, imbriqués les uns dans les autres ; des « baguettes de fée », sortes de petites massues hérissées de pointes et suspendues au bord des anciennes laisses d'eau ; des mini gours asséchés qui dessinent d'interminables festons, évocateurs des remparts et des tours d'une antique cité oubliée, quelque part dans un désert rouge...
Nous progressons ainsi jusqu'au terminus de notre expédition, la Salle du Chaos et son immense stalagmite ocre, le Minaret. Nous grimpons regarder de plus près un ensemble de concrétions qui d'en bas ressemblent à une chaire tarabiscotée ou à des mâchoires de requin, contemplons de nouveaux bouquets d'aragonite, encore plus gros, teintés d'un jaune subtil qui rappelle à certain(e)s la couleur du sorbet citron...
Philippe nous montre par où le groupe du lendemain continuera pour la visite du fond et s'inquiète quelque peu du gabarit de Greg... il est question d'une étroiture... étroite. Passera, passera pas ? Didier préconise de le menotter à une concrétion au cas où il ne passerait pas, afin d'éviter qu'une fois livré à lui-même il ne coure partout saisi d'une incoercible frénésie photographique.
Il est temps de remonter, nous retraversons ces décors avec un plaisir renouvelé, et toujours À Petits Pas Tranquilles... ce que nous comprenons tout à fait vu la splendeur de ce festival minéral.
Nous nous lançons dans une conversation animée sur la protection des grottes et leur classification au Patrimoine Mondial de l'Humanité, quand soudain... « Prôôôp ! » entendons-nous, suivi d'un « J'ai des coliques » émis par Thierry jusque là très silencieux.
Il finit par retourner avec notre guide à la « salle à manger » et son bidon-wc improvisé qu'il colmate d'un étron magistral, suscitant l'admiration sans réserve de Philippe (Les Belges quand même ! Quels hommes!).
Le soulagement n'est que de courte durée. Thierry a sa gastro annuelle, aujourd'hui et maintenant. Nous épiloguons sur le pourquoi du comment : le vol au vent ? Même le chien a refusé de le finir ! C'est dire ! La saucisse sèche ? Le café de Philippe ? C'est laxatif, le café...
Quelques centaines de mètres de lente progression plus loin, Thierry est plié en deux et menace de lâcher la sauce.
Philippe n'est pas très coopératif sur ce coup-là, peu enclin de courir le risque de bouleverser le fragile équilibre biologique de la cavité... - Dans deux minutes on est dehors ! - Deux minutes ? Tu es sûr ? - Ben, peut-être dix. Détends-toi, ça va passer. - Aaaaah ! Donne le bidon ! - Il est plein, le bidon ! Détends-toi, respire !
Nous avançons encore un peu, mais trop lentement : la situation devient critique. Philippe propose à Thierry de « faire dans son froc », mais l'intéressé n'est évidemment pas très preneur.
En l'absence d'autre solution, il pose culotte en urgence et en plein milieu du chemin (ben oui, des deux côtés, il y a balisage et donc pas touche), nous recensons tout ce que nous avons comme papier toilette, mouchoirs et sacs plastiques et le malade peut enfin s'alléger dans d'innommables gargouillis.
Après rinçage consciencieux des lieux, nous terminons la remontée et retrouvons l'air libre. Heureusement la rivière est là, qui permet à Thierry de faire sa petite toilette (ce qui n'empêchera pas Didier d'ouvrir le toit de la voiture pour tout le trajet de retour !).
Une sortie inoubliable donc, tant pour notre équipe, émerveillée par tant de splendeurs, que pour notre guide, beaucoup moins émerveillé, il faut le dire, et à jamais vacciné contre un certain club belge intitulé Les Sans Ciel :).
Merci à Philippe pour toutes ses intéressantes explications, et merci à Greg de s'être démené pour obtenir les autorisations nécessaires !
Gisèle
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