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Date : 1/28/2018
Lieu : Rochefort
Activité : Nou Maulin.

Description :

Participants : Léon-Gi-Lili-Faustine-Thierry F-JOJO-Ernest-Thierry R Jo F-Audrey-Mathieu-Thomas-Julien S-Anthony
Marc spéléo Lux


Voilà déjà plus d’un an que je n’ai plus mis les pieds dans une grotte. Après une année complète d’abstinence, je dois bien avouer que l’envie d’aller me fourrer dans un trou sombre et humide commençait à me démanger. Pour cette reprise, j’ai choisi de m’aventurer au Nou Moulin, à Rochefort. Premièrement parce que c’est mon bon ami Léon qui est titulaire de l’activité et deuxièmement car aucun équipement est nécessaire à l’exploration de cette cavité, ce qui réduit les risques pour moi d’oublier une partie de mon équipement.



Nous voilà donc tous réunis sur un parking de co-voiturage, en bord de Lomme, à proximité de l’entrée de la cavité. Une fois équipés, nous prenons ensemble la direction de la grotte. A ma plus grande surprise, l’entrée n’est pas cadenassée. Seule une grille présentant un espace suffisant entre deux barreaux que pour permettre à un individu de taille adulte de passer orne l’entrée. Joël m’explique alors que par le passé, une grille dont il avait contribué à l’installation se trouvait bien plus loin dans la grotte. Les temps changent, Joël. Même dans les grottes. Mais en me mettant ensuite à considérer l’échelles de temps pendant laquelle s’opère les changements d’ordre géologique, je me demande alors si Joël a installé la première grille durant l’holocène ou le pléistocène.



Le début de la grotte est une vraie promenade de santé. Un couloir d’un important volume se déroule devant nous et nous permet de faire un bout de chemin debout. Il nous faut bien de temps à autre nous mettre à croupis pour passer des bas plafonds mais rien de particulièrement éprouvant. Nous passons ensuite dans un tube, ayant l’apparence d’un ancien carottage, du haut duquel Léon a déroulé une corde afin de nous aider à monter sur la paroi glissante. La suite de la grotte se révèle être un peu plus sportive, impliquant à la fois des ascensions verticales en escalade et du ‘ramping’ dans des boyaux étroits. Tout ce que j’aime, en somme. C’est alors que nous arrivons au gruyère.



Le gruyère français est un fromage de lait cru de vache fabriqué dans les montagnes de la Savoie et de la Franche-Comté. C’est un fromage à pâte pressée cuite contenant de multiple trous. Leur origine provient des bactéries qui, lors du processus d’affinage, relachent du gaz carbonique en fermentant des particules de foins ayant contaminé le lait au moment de la traite des vaches. Ces gaz forment alors des cavités dans le fromage. Ce n’est bien sûr pas dans ce genre de cavité que nous nous trouvions. Le gruyère ne présentant pas de trou plus gros que la taille d’une cerise, il nous aurait été impossible de nous y glisser sans risque de l’abimer. Le lieu était ainsi baptisé en référence aux nombreux trous et galeries s’y trouvant. Nous aurions aussi pu parler d’emmental. Cette appellation aurait sans doute été plus appropriée, l’emmental possédant des trous de taille bien plus importantes que le gruyère et aussi plus nombreux. Mais nous nous égarons.



C’est sans doute ces considérations qui aura troublé l’esprit expérimenté de Léon qui finit par se perdre dans l’emmental. Il se rendit dans un trou, puis un autre, puis un autre encore. En le voyant sans cesse rentrer dans un trou pour en sortir d’un autre un peu plus loin, on avait l’impression d’assister à une scène de cartoon. Épuisé, il finit par s’asseoir. C’est alors qu’il sort de son kit le Faustine Explorator 3000. Le dernier cri en matière de navigation cavicole. Ce petit robot d’exploration se présente sous la forme d’un petit être à tête blonde. Il suffit de le poser au sol et de le téléguider à distance au son de la voix. Une caméra posée sur le casque permet de recevoir les images sur une tablette en temps réel. Beaucoup furent très excité à l’idée de l’employer pour explorer des zones difficiles d’accès tels que des siphons ou des gouffres profonds. S’en est suivi un long débat d’éthique pour savoir si les robots étaient dotées d’une âme et si lancer le Faustine Explorator 3000 au fond d’un gouffre pour en voir le fond serait un crime. Cette dernière répondant à son nom, on décida que « dans le doute » on ne ferait rien de tel.



Après quelques essais erreurs, et avec l’aide de notre petit robot, on finit par trouver notre chemin en dehors de l’emmental. C’est après quelques mètres de crapahutage, et une ascension verticale de toute beauté que nous finissons par regagner la surface.



L’histoire aurait pu s’arrêter là. C’était sans compter sur notre soif d’aventure. Sur le chemin du retour, Léon nous présente un tonneau enfoncé dans la forêt.



« C’est étrange. Ce tonneau, posé au sol, ne fait pas plus d’un mètre de haut et pourtant quand on regarde à l’intérieur il fait au moins 5 mètres de profondeur » s’exclame-t-il, incrédule.



Intrigués, Thomas, très vite suivi par Thierry, se jettent à l’intérieur. Je décide alors de les accompagnés afin qu’un homme soit présent en cas de pépin. Rassuré par ma présence, c’est la quasi-totalité du groupe qui nous rejoint ensuite et s’engouffre dans le tonneau magique. Qu’allons-nous y trouver ? Le lapin blanc ?



Nous progressons dans notre exploration du tonneau qui s’avère être d’un volume insoupçonné. Très vite, nous faisons face à un gouffre. Nous songeons alors à envoyer le Faustine Explorator 3000 dedans mais celui-ci est resté à la surface. Ce n’est pas de pot. Nous remarquons alors une main courante permettant de contourner le précipice. Chacun notre tour, nous longeons les bords à l’aide de la corde.



« Qui vient ainsi troubler le sommeil du tonneau magique » tonne une voix sombre et caverneuse en provenance du gouffre.



Ernest, qui traversait à ce moment-là, est surpris par la voix et perd momentanément ses moyens, ce qui l’amène à patiner de manière incontrôlée sur le rebord glissant. Fort heureusement, il ne lâche pas la corde. Assisté par Thomas qui avait gardé son sang-froid, et par le système additionnel de sécurité dont il était équipé, il parvint à terminer la traversée.



Une fois le groupe réunis de l’autre côté du groupe, nous continuons notre épopée. C’est alors que nous arrivons dans une salle remplie de gravier. Celle-ci présente une planché semblable à un entonnoir. En effet, au bout de salle se trouvait une faille en contre-bas par laquelle les cailloux semblaient s’engouffrer. Nous comprenons très vite que si nous voulons poursuivre notre chemin, nous devons nous frayer un passage au travers des graviers. Nous tentons tout pour y parvenir. Certains essayent de passer la tête la première. D’autres les pieds d’abord. Sur le dos. Sur le ventre. Nous essayons de dégager un maximum de gravier du trou pendant que d’autres empêchent ces graviers de redescendre en faisant barrage avec leurs jambes. Pendant au moins trente longues minutes, nos efforts pour passer restent vains.



« Peut-être vaut-il mieux faire demi-tour ? » propose quelqu’un.



« Et troubler à nouveau le sommeil du tonneau magique en passant par-dessus le grouffe ? Jamais ! » répond un autre.



C’est en chien de faïence que nous nous regardons, impuissant.



Jour 43.



Cela fait tellement longtemps que nous sommes resté coincé dans cette salle que nous avons fini par perdre la notion du temps. De notre groupe est née une communauté pourvue d’une économie basée sur l’échange de cailloux. Nous nous nourrissons principalement de chauve-souris. Selon leur taille et les résultats de la chasse, un steak de chauve-souris peut couter de 7 à 11 cailloux. Pour ce qui est de nos besoins en eau, nous recyclons notre urine en la faisant filtrer sur du gravier. Nous avons presque oublié la raison pour laquelle nous sommes ici. Cependant, nous ne cessons jamais de regarder ce trou, sans trop savoir pourquoi. Un jour, celui-ci se mit à parler.



« Je suis passé ! Envoyez moi Ernest ! »



Horreur. Voilà que le trou s’est mis à réclamer Ernest en sacrifice. C’est alors qu’on s’aperçoit que Joséphine n’est plus parmi nous. Le trou avait dû la prendre pendant la nuit. Désemparé, nous cédons à sa demande et envoyons Ernest rejoindre sa sœur au paradis où elle devait certainement se trouver, changée en ange. C’est impuissant que nous observons le trou avaler Ernest, tel un démon de roche sombre et froid.



« Envoyez-moi maintenant la personne la plus fine d’entre vous ! »



Catastrophe. Le trou en redemande. Je décide de me porter volontaire pour ce sacrifice, espérant mettre fin au massacre. Après tout, le trou ne devait plus avoir très faim s’il a réclamé quelqu’un de fin. Peut-être qu’après moi, les autres seront en paix.



Je m’enfonce alors dans la gueule du rocher, non sans difficultés. Je dois enlever mon casque pour passer. Je pousse, je pousse. J’essaie de me rappeler comment j’ai fait aux premières heures de ma vie. Ciel ! Que c’est étroit ici ! Je rentre la poitrine et Ploup ! me voilà de l’autre coté. Ernest et Joséphine sont là. Ils ne se sont pas changés en ange ! Mes souvenirs me reviennent. Joséphine avait réussi là où tout le monde avait échoué avant elle. Ensemble, nous enlevons un maximum de gravier de notre coté en utilisant nos casques comme des pelles et très vite tout le monde parvient à passer. C’est avec soulagement que nous sommes enfin réunis.



La suite du chemin fut une partie de plaisir comparé à ce que nous avons vécu et très vite nous regagnons la surface. Quel tonneau merveilleux.



C’est encore une formidable aventure que nous avons vécu sous terre et il ne fait aucun doute que notre épopée sera contée sur plusieurs générations sur les terres de Rochefort.

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Anthony

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